Brasserie De Molen - La fermeture

Logo de la brasserie De Molen

Réputation et avis des amateurs

La brasserie De Molen jouit d’une réputation d’excellence parmi les amateurs de bière artisanale. Sur les sites d’avis spécialisés, elle figure régulièrement au sommet des classements : en 2010, De Molen était classée 10ᵉ meilleure brasserie au monde selon RateBeer, et a grimpé à la 6ᵉ place en 2016. Ses créations ont dominé les palmarès néerlandais, occupant 7 à 8 des 10 premières places des « meilleures bières des Pays-Bas » en 2008 et 2009. De même, sur BeerAdvocate, pas moins de 13 bières De Molen figurent parmi le top 100 néerlandais, dont 4 dans le top 10 avec Hel & Verdoemenis (Bourbon BA) sacrée numéro 1 du pays.

Sur Untappd, la popularité de De Molen se traduit en chiffres impressionnants : plus de 1,6 million de notes y ont été enregistrées pour ses bières, avec une note moyenne globale avoisinant 3,7/5. À titre d’exemple, Hel & Verdoemenis, un Imperial Stout emblématique de la brasserie affiche une moyenne de 3,84/5 pour plus de 66 000 dégustations, témoignant de l’enthousiasme des beer geeks du monde entier. Les consommateurs louent en particulier le caractère audacieux et puissant des bières de De Molen, notamment ses stouts impériaux et barleywines aux saveurs riches et complexes. Sur les réseaux sociaux et forums spécialisés, on retrouve de nombreux témoignages passionnés : un amateur américain confie par exemple « cela doit faire plus de dix ans que je n’ai pas vu une de leurs bières en rayon… j’aurais aimé pouvoir les soutenir davantage », soulignant l’aura quasi-légendaire qu’a acquis De Molen auprès des connaisseurs. Un autre n’hésite pas à qualifier la nouvelle de sa fermeture de « tragédie absolue », rappelant qu’il s’agit à ses yeux de « l’une des brasseries les plus importantes des dernières décennies », inégalée dans son travail sur les malts foncés. Ces retours illustrent à quel point la brasserie de Bodegraven a marqué les esprits dans la communauté brassicole.

 

Histoire, contributions et styles emblématiques

Une vue de la brasserie De Molen dans le moulin historique « De Arkduif » à Bodegraven, symbole de son ancrage entre tradition et innovation.

Fondée en 2004 par le brasseur Menno Olivier dans un moulin à vent du XVIIᵉ siècle (le De Arkduif, construit en 1697, sur les rives de l’Oude Rijn), Brouwerij De Molen a su allier tradition et créativité dès ses débuts. Menno Olivier, d’abord brasseur amateur passé par de petites brasseries néerlandaises, a insufflé à De Molen un esprit résolument novateur. Très vite, la petite brasserie artisanale de Bodegraven s’est fait un nom grâce à ses recettes audacieuses, au point de devenir une figure de proue du mouvement craft aux Pays-Bas et de gagner une reconnaissance mondiale. De Molen a participé à de nombreuses collaborations internationales (par exemple avec Mikkeller au Danemark ou De Struise en Belgique) et même à la recréation de recettes historiques oubliées, témoignant de son goût pour l’expérimentation et le partage du savoir-faire brassicole. Son rayonnement a largement dépassé les frontières : la brasserie exportait ses bières vers plus de 40 pays au sommet de son succès. Cette diffusion internationale a contribué à forger son aura, tout comme ses bières au caractère bien trempé et aux noms évocateurs.

De Molen s’est en effet rendue célèbre pour ses bières fortes et originales, dont les noms comportent souvent une esperluette (« & »), marque de fabrique symbolisant les alliances de saveurs improbables chères à la brasserie. Parmi ses créations les plus iconiques, on peut citer :

  • Hel & Verdoemenis (« Hell & Damnation ») : Imperial Stout robuste, aux notes intenses de café et chocolat, considéré comme le fer de lance de la brasserie.

  • Bommen & Granaten (« Bombes & Grenades ») : Barleywine riche titrant ~11%, truffé de fruits secs et de malt, maintes fois salué par les connaisseurs pour sa profondeur.

  • Vuur & Vlam (« Feu & Flammes ») : IPA amère et aromatique, illustration que De Molen excellait aussi dans des styles plus houblonnés.

Au fil des ans, De Molen a accumulé les distinctions et moments forts. Dès 2008, Menno Olivier s’est vu décerner le prix Zilveren Knuppel pour sa contribution à la culture de la bière aux Pays-Bas. La même année, la porter impériale Tsarina Esra de De Molen a été élue bière d’hiver la plus appréciée lors du festival PINT Winterbierfestival. Les experts britanniques Roger Protz et Tom Cannavan ont intégré la brasserie et plusieurs de ses breuvages dans leur sélection des « Beers of the Year 2008 », soulignant l’impact international de De Molen dès la fin des années 2000. La montée en puissance s’est poursuivie : en 2016, les RateBeer Awards ont couronné De Molen meilleure brasserie des Pays-Bas (et 6ᵉ meilleure au monde), confirmant son statut d’institution brassicole.

Parallèlement, la brasserie a su fédérer la communauté des beer geeks en créant dès 2009 un événement devenu incontournable : le Borefts Beer Festival. Chaque année à l’automne, De Molen invitait des brasseries artisanales du monde entier à Bodegraven, attirant des milliers de visiteurs venus déguster des créations uniques dans l’ambiance conviviale du moulin. Ce festival, haut lieu d’échanges entre passionnés, a contribué à asseoir l’importance de De Molen sur la scène brassicole internationale, tout en dynamisant la culture bière locale.

D’un point de vue industriel, pour répondre à la demande grandissante, De Molen a dû s’agrandir : dès 2012, une nouvelle salle de brassage de 2500 litres a été installée à deux pas du moulin, puis l’ensemble des installations a encore été étendu en 2016, portant la capacité annuelle à 25 000 hectolitres. En 2019, face à cette croissance, la brasserie a cédé l’intégralité de ses parts au groupe néerlandais Royal Swinkels Family Brewers (maison-mère de Bavaria, La Trappe, Rodenbach, etc.), qui était déjà partenaire de De Molen depuis quelques années. Cette acquisition par un acteur majeur de l’industrie laissait espérer des moyens accrus pour pérenniser la brasserie tout en diffusant ses produits plus largement. Hélas, comme on le verra, le contexte du marché en a décidé autrement.

 

Vers une fermeture annoncée : rumeurs, confirmations et réactions

Fin janvier 2025, des rumeurs alarmantes secouent la sphère brassicole : sur un groupe Facebook de passionnés de bière, un message émanant d’une source habituellement bien informée affirme que « Brouwerij De Molen fermera ses portes le 1er septembre ». L’information, reprise sur Reddit et d’autres forums, suscite immédiatement l’émoi de la communauté. Quelques jours plus tard, une annonce officielle vient malheureusement confirmer la nouvelle : la maison-mère Royal Swinkels déclare publiquement son intention de cesser les activités de De Molen d’ici septembre 2025, invoquant des performances en berne. D’après le porte-parole, les résultats de la brasserie de Bodegraven étaient « sous pression depuis un certain temps », en raison notamment de la baisse de la consommation de bière sur le marché. Swinkels explique qu’il ne lui est plus possible d’opérer le site de manière rentable dans sa configuration actuelle, évoquant à la fois un déclin de la demande et un bail devenu défavorable pour les locaux historiques de la brasserie. La direction a soumis son plan de fermeture au comité d’entreprise (Works Council) pour consultation, tout en indiquant qu’en l’absence d’alternative viable, la brasserie fermera définitivement ses portes au 1ᵉʳ septembre 2025. Cette perspective sonne comme la fin d’une époque : après plus de deux décennies à façonner le paysage de la craft beer néerlandaise, De Molen s’apprête à tirer sa révérence.

Les réactions ne se sont pas faites attendre. Stupeur et tristesse dominent chez les amateurs de bière du monde entier. Sur les réseaux sociaux, les messages d’hommage affluent pour saluer l’héritage de De Molen. « C’est un choc, on perd l’une des brasseries artisanales les plus influentes de ces dernières décennies », déplore un passionné, quand un autre raconte ses « souvenirs inoubliables à déguster une De Molen le long des canaux d’Amsterdam ». Beaucoup expriment leur désarroi face à cette fermeture qu’ils interprètent comme un symbole du déclin de l’âge d’or de la bière artisanale. « De Molen était une de ces brasseries dont je parlais avec une certaine nostalgie depuis des années… Sa disparition marque un coup dur personnel », confie un intervenant sur un forum spécialisé, reflétant un sentiment partagé. D’autres notent avec amertume que les bières de la brasserie étaient devenues difficiles à trouver récemment, signe avant-coureur de ses difficultés (« Je n’en voyais déjà plus depuis longtemps par chez moi… »). L’annonce a également suscité de vives discussions quant aux causes sous-jacentes : certains y voient les effets d’un marché de la bière saturé et en mutation, où même des brasseries réputées peinent à survivre face à la concurrence industrielle et aux changements de consommation.

Le sort du Borefts Beer Festival, événement emblématique organisé par De Molen, est lui aussi en suspens. Royal Swinkels a indiqué qu’aucune décision n’était prise concernant l’édition 2025 du festival, laissant entendre que ce rassemblement de septembre pourrait ne pas avoir lieu. C’est une déception majeure pour la communauté, tant Borefts était devenu un rendez-vous annuel prisé des beer geeks européens. Par ailleurs, l’incertitude règne pour les douze employés de De Molen, dont l’avenir professionnel est remis en question par la fermeture annoncée. La direction n’a pas encore précisé si des reclassements ou aides seraient proposés, et le public suit de près l’évolution de la situation.

Du côté de Royal Swinkels, on tente de rassurer en affirmant que certaines bières phares de De Molen pourraient continuer à être brassées au sein d’autres unités du groupe. Cependant, aucun détail n’a filtré sur les recettes concernées ni sur les modalités, et beaucoup de fidèles craignent que l’âme artisanale des breuvages De Molen ne puisse survivre hors du cadre unique du moulin de Bodegraven. Pour nombre d’observateurs, la perte de ce lieu hautement symbolique, un moulin du XVIIᵉ siècle abritant l’une des brasseries les plus créatives du pays représente un appauvrissement du patrimoine brassicole. La fermeture de De Molen signe la fin d’une ère, suscitant des interrogations sur la préservation de l’héritage de la bière craft aux Pays-Bas. Elle s’inscrit dans une vague plus large de consolidation de l’industrie, où les grands groupes absorbent ou ferment des microbrasseries pionnières, faisant craindre une uniformisation de l’offre.

Néanmoins, tout n’est pas totalement sombre dans ce tableau : l’histoire de De Molen ne disparaît pas sans laisser de traces vivantes. Menno Olivier, le fondateur visionnaire, a poursuivi son aventure loin des moulins néerlandais. Après son départ de De Molen, il s’est installé en Espagne où il a lancé en 2024 sa propre entreprise Menno Olivier Brewing, avant de rejoindre la brasserie artisanale catalane La Pirata Brewing pour continuer à brasser des bières innovantes. Ainsi, l’esprit créatif qui animait De Molen survivra à travers de nouveaux projets, et l’héritage de la brasserie continuera d’inspirer les passionnés. Reste que pour des milliers d’amateurs à travers le monde, l’annonce de la fermeture de De Molen a l’effet d’un coup de tonnerre. Visitez-la aujourd’hui, car demain il sera trop tard : tel pourrait être le mot d’ordre des fans attristés, bien décidés à célébrer une dernière fois les bières de cette brasserie de légende avant que le moulin ne cesse définitivement de tourner.

 

Sources :

en.wikipedia.orgen.wikipedia.org

en.wikipedia.org

beeradvocate.com

untappd.com

inside.beer

reddit.com

beer.be